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Archives, existence, expo 5 février, Musée d'art et d'histoire du Judaïsme, oeuvre d'art, Paris, passages, rue du Temple, Walter Benjamin
L’expo « Walter Benjamin Archives » est ouverte depuis le 12 octobre 2011, au Musée d’art et d’histoire du Judaïsme, à Paris, et se termine le 5 février.
(Photo : Paris, rue du Temple, 3e. Cliquer pour agrandir.)
Je suis allé la visiter de justesse le 1er février et j’ai pensé, après coup, que j’aurais manqué sans cela une très belle présentation de la vie de l’écrivain : son approche de l’Histoire et de la mémoire, et les traces impérissables qu’il en a laissées, non seulement par ses œuvres, mais dans ce qui constitua la durée même de son existence (1892-1940).
(Photo : hôtel Saint-Aignan, statue du capitaine Dreyfus. Cliquer pour dégrader.)
Ce qui frappe, dans le parcours que l’on suit sur deux étages, c’est la multiplicité, le foisonnement méthodique et archivé des documents ou objets présentés ayant appartenu à Walter Benjamin : manuscrits, « écrivailleries » (textes, notes, cartothèques), micrographies (écriture incroyable en pattes de mouches), jouets russes, notation des paroles de son fils, carnets, cartes postales, billets, factures de cafés à Paris (Le Sélect, Le Flore, Les Deux-Magots…) ou de restaurants, collections de chiffons, jeux, figures de Sybille et mosaïques de Sienne…
(Photo : cliquer pour agrandir.)
Le concept de l’aura se trouve déjà écrit sur une feuille à l’en-tête de la marque San Pellegrino avec étoile rouge. « Qu’est-ce au juste que l’aura ? Une trame singulière d’espace et de temps : l’unique apparition d’un lointain, si proche soit-il. »
(Photo : cliquer pour agrandir.)
L’étonnante richesse de la « collection » proposée demanderait plusieurs heures d’observation et de déchiffrement. Cela aurait été possible car, l’autre matin, je n’ai compté qu’une demi-douzaine de visiteurs.
(Photo : cliquer pour agrandir.)
La « constellation intellectuelle » dans laquelle naviguait Walter Benjamin est présente avec Dora Benjamin (sa sœur), Gershom Sholem, Theodor W.Adorno, Max Horkheimer, Hannah Arendt, Bertolt Brecht, Gisèle Freund (la photographe), Adrienne Monnier.
(Photo : cliquer pour éclaircir.)
Cette exposition est une manière de « passage », comme ceux, célèbres, que l’écrivain a su décrire dans leurs labyrinthes : surprises, images d’un temps où l’industrie se développe avec son talent (et talon) de fer, où le « Paris capitale du XIXème siècle » demeure une « fantasmagorie » à la Baudelaire.
(Photo : cliquer pour agrandir.)
En sortant de l’hôtel qui abrite le musée (deux têtes de lion sur la porte massive et un sas dans l’entrée avec portique de sécurité), je pensais qu’il était urgent de relire l’auteur de L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité, et de retrouver son regard perçant, décapant, sans concessions à l’air, fâcheusement toujours empuanti, du temps.
(Photo : cliquer pour agrandir.)
(Alban Berg, Sonate opus 1 pour piano)
JEA a dit:
Alors que tant de suicides posent une ultime question restant sans réponse
le sien
répond à l’invasion du nazisme et de son antisémitisme
à la frontière d’une Espagne ensanglantée et cadenassée par Franco
et d’une France maréchaliste où l’extrême droite va « enfin » détenir tous les pouvoirs
Dominique Hasselmann a dit:
@ JEA : une leçon, que cette existence et cette exigence.
brigetoun a dit:
merci – à défaut de s’être enrichi par cette visite nous aurons au moins le désir nostalgique de l’avoir fait
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigetoun : j’ai pris ces photos à la dérobée (j’ai dû déposer mon couteau suisse dans une petite boîte, et l’ai récupéré à la sortie).
Francesca a dit:
Ah, je comprends mieux ! Je me demandais comment tu avais pu prendre ces photos sans te faire « pecho »…
J’ai vu l’expo à son tout début, me promettant d’y revenir tant est foisonnant le matériel exposé, mais… Un petit tour demain peut-être, dernière chance de revoir.
@ Francesca : oui, il faudrait avoir le temps de tout lire, même si parfois avec une loupe ! D.H.
brigetoun a dit:
s’être enrichis voulais-je ajouter et corriger – et la machine avec raison me dit vous envoyez des commentaires trop vite – ralentissez
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigetoun : elle vous surveille de près !
M a dit:
Très belles photos. Un petit regret, même en agrandissant la 5 je n’arrive pas à déchiffrer le texte..
Dominique Hasselmann a dit:
@ M : bizarre car pour moi le format choisi (1000 x 1333 pixels) suffit à permettre la lecture. Mais je vais l’augmenter !
M a dit:
Merci. La petite loupe me révèle enfin le vrai visage de ce panneau…
@ M : mais normalement, la petite loupe était déjà présente même pour la taille en-dessous ! D.H.
Désormière a dit:
Toute une vie, une pensée qui perdure. Objets d’un foisonnement, d’une intensité, avant l’acte qui signe et parachève une oeuvre qui pourtant n’a pas eu de fin.
Aujourd’hui, le visiteur, en un moment, vient comme pour se recueillir et témoigner.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Désormière : c’est vrai que l’on regarde tous ces papiers et objets avec une sorte de religiosité.
jeandler a dit:
Le couteau Suisse déposé dans une petite boîte
mais l’appareil photo passé en suisse !
Montaigne avait ses paperolles
Benjamin ses écrivailleries
l’air de rien
Dominique Hasselmann a dit:
@ jeandler : normal, l’un peut être une arme (quoique l’autre aussi…).
rvjeanney a dit:
On rêve de telles expos en dehors de Paris, ah, joli rêve de tous les petits ploucs de province – c’est en ça que l’Allemagne me fait rêver, vraiment.
Dominique Hasselmann a dit:
@ rvjeanney : mais vous avez maintenant un Beaubourg à Metz (et un Louvre à Abu Dhabi !).
Gilbert Pinna a dit:
Merci pour la visite… (J’ai découvert il y a quelque temps ce promeneur citadin qu’était W.B : « Sur mon chemin en allant au vieux port, déjà cette démarche merveilleusement légère et ferme qui changeait le sol pierreux et inarticulé de la grande place en sol d’une route campagnarde sur laquelle, moi, pèlerin dispos, m’acheminais dans la nuit. » Hachich à Marseille in Ecrits français)
Dominique Hasselmann a dit:
@ Gilbert Pinna : merci pour la citation ! Je n’avais pas de cigarettes dans mon sac à dos.
Quotiriens a dit:
me voilà l’eau à la bouche (qu’il me faut vite fermer avant qu’elle ne gèle).
Dominique Hasselmann a dit:
@ Quotiriens : mais là-bas, dans votre lointaine province, vous connaissez sans doute d’autres rigueurs ! Et vous avez sûrement un passe-montagne de qualité !
Bonheur du Jour a dit:
Merci pour cette visite. Merci de rappeler l’existence de personnes comme Walter Benjamin : les fascistes ont peut-être gagné sur l’instant, mais ils ont perdu, et pour toujours, à l’aune de l’histoire puisqu’il est encore une lumière qui peut guider des pas vers la liberté.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Bonheur du Jour : rien n’est jamais acquis… sauf effectivement ce que l’Histoire engrange de positif et d’espérance.
Calypso a dit:
« Dites ces mots « ma vie » et retenez vos larmes… »
@ Calypso : merci pour cette phrase (et on pourrait en trouver tant d’autres aussi !). D.H.
Olivier SC a dit:
Je ne savais pas qu’Arielle avait sa Rue … Ah oui, là, pour suivre, il faut avoir tout lu et tout regardé les photos offerte par DH dans ce billet 😉
Dominique Hasselmann a dit:
@ Olivier SC : mais elle n’avait pas encore Internet !
Calypso a dit:
La rue est « de Dombasle » (célèbre agronome) et non « Dombasle » (obscure pétasse du national-sarkozysme). A la même époque, sur le trottoir d’en face, demeurait un certain René Daumal auteur de « La Grande Beuverie » et du Mont analogue », qui tant nous marquèrent…
@ Calypso : « Le commencement de tout ce que je vais raconter, ce fut une écriture inconnue sur une enveloppe. » (Première phrase du « Mont analogue » (page 29, éd. Gallimard 1952, rééd. 3ème trimestre 1968). D.H.
Dom A. a dit:
Passant hier soir, épuisé d’une trop longue et triste journée, devant le lycée
Emile Zola de Rennes, autrefois Chateaubriand (avant 68, la préhistoire) sa chapelle,
pensant toujours, très exactement: à chaque fois, au père Ubu et au capitaine Dreyfus. Une autre statue est visible. Mémoire parallèle.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Dom A : Emile Zola, comme le miroir en papier vengeant le sabre sabré !
Quant à l' »expérience de l’oeuf électrique », vue sur le site auquel tu renvoies, elle aurait ravi Jarry.
Calypso a dit:
Jarry (Alfred) : survolant les trois pages que « Libération » consacre ce week-end à « une présence africaine et antillaise longtemps ignorée » (en France), on se prend à imaginer qu’il faudrait peut-être un jour rendre obligatoire dans les collèges et lycées de Rennes, de Laval et d’ailleurs la lecture de quelques écrits de Frantz Fanon et aussi celle de cette « spéculation » de Jarry intitulée « Paris colonie nègre » parue dans le numéro de « La Revue Blanche » daté du 1er avril 1901 (La Pléiade, tome II, pp. 287-288).
@ Calypso : le prochain ministre de l’Education nationale, s’il est enfin un homme de qualité, devrait souscrire à cette proposition, parmi d’autres qui lui seront sans doute soumises ou qu’il aura à coeur de mettre en jeu. D.H.