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"filles-crevettes", "Sur la planche", film marocain, Leila Kilani, Tanger
Film marocain, Sur la planche, se déroule à Tanger (le soleil de carte postale s’est absenté), avec une fille qui travaille dans une usine de mise en boîtes de crevettes une fois décortiquées à la main, et c’est l’histoire touchante de ses dérives, de ses rencontres, de son exploitation, de sa vie confinée d’où elle cherche à s’évader.
(Photo : MK2 Beaubourg, hier soir à Paris. Cliquer pour agrandir.)
La cinéaste Leïla Kilani met en scène la même fougue que son interprète principale, la même sensibilité que les trois autres actrices. Les « filles-crevettes », à l’odeur prégnante, sont l’inverse des « filles-textiles », celles qui travaillent dans le prêt-à-porter de marque, et les trafics en tous genres représentent pour elles la seule manière de s’en sortir.
(Photo : cliquer pour agrandir.)
Les plans sont filmés à l’arraché, sans fioritures, la nuit est la nuit, la pluie est la pluie et balaie l’espace urbain, l’arabe est une langue qui chante, la voix off un murmure poétique, un chant, une mélopée obsédante.
Il existe une rage dans ce film, une énergie peu commune (les petites fictions françaises font pâle figure avec leurs champs/contre-champs académiques) qui aident à croire que la révolte est toujours là, malgré les bourrasques ou l’ordonnancement des usines, alimentaires ou automobiles, qui tient lieu de ligne de vie.
(Photo : cliquer pour agrandir.)
(Mustapha Oumguil)
brigetoun a dit:
et que leur rage ne soit pas sans effet eux ces biens heureux jeunes qui sont notre chance – que la désespérance ne leur vienne pas trop tôt
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigetoun : sur le plan artistique, en tout cas, il y a de l’espoir.
brigetoun a dit:
se réchauffer contre le faux atelier – une photo qui donne le petit goût de mes désespoirs parisiens assez charmants au fond
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigetoun : le lampadaire joue le rôle de radiateur en l’air.
Calypso a dit:
@ brigetoun : oui, la dernière photo a quelque chose de tragique, comme tout ce qu’on a construit sous Pompidou. Qui n’a pas connu le quartier Saint-Merri, y verra peut-être comme le souvenir d’une peinture de Magritte ou de Delvau. Sinon…
« Le grand terrain vague de Saint-Merri, creusé en plein terreau de maisons et d’histoire, propose des profilées pointues de toitures, d’étroits et blêmes damiers de fenêtres, dont plusieurs cassées en étoile, une steppe bâtarde où les montreurs de serpent et les chanteurs de contes font leur travail, qu’il suffit d’évoquer, mais, décidément, ils ne sont pas là, ils sont à Fez ou ailleurs, et c’est très bien. C’est très bien qu’il n’y ait pas de romanesque prémédité, consenti, ou qu’il le soit au minimum, et que tout (les étendards, les carnavals) doive se passer dans la cervelle de l’amateur aux prises avec la jouissance des espaces respirés, remangés, des murs chargés de l’évidente écriture du passé, des porches de la rue du Maure, ou de la rue Brantôme opaques et majestueux comme s’ils donnaient sur les palais d’une pensée impérialement théologique, persane ou babylonienne, dont la seule trace au langage et à l’usage concrets seraient que ces porches commandent, souvent, des resserres de “diables”. » (Jacques Audiberti, « Ombres de Paris », 1945.).
@ Calypso : merci pour cette belle citation. En fait, les « diables » d’Audiberti ont forcément deux cornes et deux roues.
Calypso a dit:
@ D.H. : j’ai oublié le « X » à Paul Delvaux, qui a peint beaucoup de scènes de nuit, celle-ci par exemple :
PdB a dit:
heureusement qu’il existe des femmes de cet acabit (si on compare avec la berra-que les sdf restent chez eux- ou la morano,-accent d’éva joly- y’a du chemin à faire, les filles…!)(écouter ici : ) (on ira voir)
Dominique Hasselmann a dit:
@ PdB : je l’ai entendu hier matin, François Morel, bravo à lui !
Mais elle a, la Berra, le culot + le toupet de lui répondre (en plus de se présenter aux législatives à Lyon, j’espère que la jolie candidate du PS la renverra sous sa tente de chez Vuitton).
JEA a dit:
ces Marocaines ont pour ancêtres les femmes de Concarneau esclaves de la mise en boîtes des sardines…
Dominique Hasselmann a dit:
@ JEA : mais elles n’ont pas la même coiffe.
Cowboy a dit:
Décidément, « toutes les civilisations ne se valent pas ». Au coeur de la mienne, provinciale, les programmateurs de salles ne semblent pas (je viens encore de le vérifier) avoir prévu de mettre ce film à l’affiche. Toujours tout pour les mêmes. Encore une fois, « Parigots, têtes de veaux, Parisiens, têtes de chiens » 🙂 🙂
PS Je sais, vous allez encore me dire que je peux prendre le train et ça va m’agacer.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Cowboy : attendez quelques mois, il sortira bien en DVD, peut-être chez Potemkine (je vous ferai signe, ils ne sont pas loin de chez moi).
chantal serrière a dit:
Pas étonnant que L’auteur de ce billet ait trouvé la solution de l’énigme!
Dominique Hasselmann a dit:
@ chantal serrière : ah bon ! Je vais aller voir !
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