Mots-clés
Bolloré, choucroute, Costa Croisières, gare de l'Est, Guy Môquet, Hollande, Nicolas Sarkozy, Pujadas, Yves Boisset
« J’ai commis des erreurs, mais qui n’en fait pas, hein ? Peut-être que la plus grande, c’était de me représenter ? Et, au fond, est-ce que j’ai l’air d’un représentant ? Mon concurrent me nomme sans cesse, dans ses meetings désertiques, « le candidat sortant », ça lui évite de prononcer mon nom (comme dans le film d’Yves Boisset, Le Juge Fayard, où le mot SAC avait dû être masqué par un bip). Maintenant, je pense que je serai bientôt devenu dans sa bouche « le candidat sorti ».
Hier soir, mais chut, hein ?, je me suis entraîné à fêter ma défaite, j’ai été très discret, cette fois on ne pourra rien me reprocher. J’avais d’abord dit à Pujadas, dans son émission sur France 2, qu’en cas de victoire je la partagerais avec ma famille et quelques amis : mais là, je préfère m’exercer à digérer le résultat d’abord tout seul. J’avais emporté mon micro-ordinateur dans cette chambre d’hôtel parisien mais bien français, au confort spartiate (c’est une marque de chaussures, je crois), et je me suis repassé en boucle les cinq « mea culpa » que lemonde.fr a gentiment extrait de cette longue soirée.
Les autres, le soir du 6 mai, les soi-disant « socialistes », ils seront déjà en train de danser la Carmagnole à la Bastille, et Hollande mettra la dernière main à son programme d’épuration, ça doit lui plaire de devenir une sorte de petit chef d’un nouveau CNR – il faudra juste lui trouver l’équivalent d’un Jean Paulhan, dommage que Jean Dutourd ne soit plus parmi nous.
Le 23 mars sur Arte, je ne dois pourtant pas oublier de regarder La Mer à l’aube (comme celle de mon affiche de campagne), le film sur Guy Môquet, une grande figure de mon quinquennat que j’ai été le premier à célébrer dignement (j’espère qu’on lit encore sa lettre en classe, il faudra que je pose la question à Luc Chatel) ; décidément, la Résistance résiste toujours au temps, c’est fatigant.
Certes, il me reste encore quelques meetings à me farcir (pour Villepinte, mes conseillers tablent sur 50 000 personnes !), des émissions de télé auxquelles je devrai participer, mais, à vrai dire, je n’ai plus « la niaque », ça se voit tant que ça, hein ? Tout mon entourage semble d’ailleurs me lâcher, et les confidences, par exemple hier dans Le Canard enchaîné, de certains ministres (mon collaborateur le plus proche aurait dit « Ça devient compliqué de chez compliqué pour que Sarko gagne ! ») sont destinées à m’enfoncer un peu plus.
Si l’âge est un naufrage, le pouvoir est un navire de chez Costa Croisières. J’avais bien fait de choisir en priorité le yacht de Bolloré, au moins il flotte et ne coule pas. Peut-être que, dès le 7 mai, ce fier entrepreneur me proposera une petite virée en Grèce (après le pire, Le Pirée), il s’est toujours montré un ami fidèle.
Finalement, cette soirée m’aura fait du bien : j’étais seul, sans Guaino, Guéant, Fillon ou Juppé. Quant à Carla, elle a passé la soirée dans son bel appartement, elle pouvait s’occuper tranquillement de sa fille.
Soudain redevenu célibataire, enfermé dans cet hôtel près de la gare de l’Est, je suis descendu alors, après l’agitation médiatique, me taper une énorme choucroute (avec du jarret de porc), il paraît que c’est la spécialité du quartier, en attendant de reprendre mon job tout à l’heure.
Heureusement la fin approche, hein ? »
(Photo : Paris, le 5 février, près de la gare de l’Est. Cliquer pour ouvrir plus largement.)
(Michel Fugain, La Bête immonde)
Une Parisienne a dit:
Rares élégance et distinction dans cette valise new-look ! Le groom aussi a l’air sympa.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Une Parisienne : Eh oui, ce n’est plus le personnel du Fouquet’s !
brigetoun a dit:
j’aime bien le hein ? final qui nous ramène au langage toujours interrogatif de votre personnage.
si cela pouvait être vrai.. aurais presque, presque, un moment de pitié pour lui
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigetoun : on ne lui appliquera quand même pas la peine de mort.
brigetoun a dit:
mais la mort de son ego si
gballand a dit:
Un monologue qui explore les nombreuses facettes du personnage. La curiosité est grande, parfois, de savoir ce qui se passe dans la tête d’un président. En tout cas, ce président-ci sait être « bas », et le « débat » avec Fabius en a donné un exemple. Il faut dire que Fabius était une proie rêvée pour Sarkozy…
Dominique Hasselmann a dit:
@ gballand : envoyer Fabius au front (si j’ose dire) n’était peut-être pas la meilleure tactique – malgré une présence de poids – car il prêtait évidemment le flanc à toutes les « petites phrases » que l’entourage de NS avait soigneusement listées et stabilobossées pour l’occasion.
Mais François Hollande a rétabli hier soir la situation dans le journal de France 2, et de manière magistrale, par sa volonté affichée (« un homme qui ne sait pas dire non », disait son concurrent mardi…) et son ambition claire : « Je gouvernerai non pour moi mais pour les Français. »
gballand a dit:
Voici un lien intéressant au sujet de cette émission.
@ gballand : merci. Ce type ne manque pas d’aplomb : mais le plomb, il l’aura bientôt dans l’aile. D.H.
Désormière a dit:
Comme cadeau de départ, j’aimerais lui offrir une planète. Loin, très loin.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Désormière : celle-ci ? Il aura tout le temps pour aller à la Cinémathèque !
PdB a dit:
« l’enfant que la bêtise a conçu avec l’ombre… » Très bon choix de musique, en effet…. Allez que l’ordure s’en aille, avec son fric et ses ambitions poisseuses, on ne la pleurera pas
Dominique Hasselmann a dit:
@ PdB : s’en aller ? Il faudra juste lui donner un petit coup de pouce, et dès le premier tour.
Cowboy a dit:
« Encore quelques meetings à se farcir » (sic). Il est décidément bel et bien le chef de l’étal. 🙂
Quant à la « bête immonde », elle m’a rappelé une chanson magnifique de Jean-Max Brua (aussi chantée par Francesca Solleville), où l’on entend ce vers : « ils ont le muffle court et le front de la bête ». Ça s’intitule « Camarade Chili ». Daté, certes, mais quel souffle ! D’abord, un texte parlé, puis la chanson, sublime. A cette adresse.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Cowboy : à fronts renversés…
brigitte giraud a dit:
« Écrasons l’infâme ! » Voltaire terminait ainsi toujours ses lettres.
Clafoutis a dit:
Oui, mais pas aujourd’hui ; j’ai cru comprendre (d’après la radio) que c’était sa journée !
Patientons : il ne perd rien pour attendre.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Clafoutis : C’est la journée du droit des femmes, non ?
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigitte giraud : Il semble qu’Aillagon se prenne maintenant pour Voltaire… mais il n’est pas trop tard pour ne plus regretter les ors de Versailles.
Clafoutis a dit:
Pardon, pardon : j’avais compris que c’était la journée du droit des infâmes !
Donc j’me disais : « Pas aujourd’hui… Patientons un peu. »
Suis-je t’y sot !
Mais j’comprends qu’y faut qu’je fasse réparer mon transistor (ou mon Sonotone).
Donc on peut l’écraser dès maintenant ?
Tant mieux, tant mieux. Pourquoi attendre ?
Ah ! La Constitution, touça touça ?
Eh bien patientons.
@ Clafoutis : la cerise (il sera le temps) sur le gâteau est prévue le 6 mai au soir. D.H.
jeandler a dit:
Les 5 mea culpa de S. titrait le monde sur internet !
Croirait-il à la grâce de l’absolution ?
Sans grimaces. Infantilisme aggravé.
Ne va-t-il pour pénitence grimper à genoux l’escalier élyséen ?
Dominique Hasselmann a dit:
@ jeandler : il est déjà à genoux.
Et il nous ferait presque – Ach ! Katastrophe ! – une sorte de chantage maquillé.
Ou un énorme lapsus.
caro.carito a dit:
Ainsi Fugain a commis ce genre de musique, étonnant…
Dominique Hasselmann a dit:
@ caro.carito : incroyable, même !
les cafards a dit:
on pourrait oser l’expression : ça sent le pâté !
Dominique Hasselmann a dit:
@ les cafards : en cette journée du 8 mars, vous pouvez mettre l’expression au féminin !
Pierre Chantelois a dit:
En cas de défaite Nicolas pourrait venir se consoler chez son ami Desmarais au riche domaine de Sagard en reconnaissance d’une Légion d’honneur.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Pierre Chantelois : et avec son autre ami, plus proche géographiquement, Dominique Desseignes, il n’aura que l’embarras du choix pour se trouver un pied-à-terre.