Étiquettes
"Mille et une nuits", aphorismes, fringues, Henri Heine, Karl Kraus, Karl Lagerfeld, Lichtenberg, rue Bichat (10e)
Immanquablement, lorsque je passe dans cette rue, je remarque en l’air l’enseigne qui me fait penser au célèbre « déconstructeur » littéraire Karl Kraus – celui dont le travail fut de « prendre le langage au mot » – et voici que je suis à nouveau entraîné vers deux articles écrits en janvier 2006 puis en juillet 2008 à partir de son nom et de ses chers aphorismes (comme ceux de Lichtenberg).
Or, ce qui est incroyable, c’est que la mise en vente de cette entreprise n’a toujours pas, depuis cinq ans, abouti à son rachat par une chaîne de fringues. L’intitulé « Kraus S.A. » se maintient donc fièrement contre les jours, les mois, les ans qui se succèdent sans pouvoir le faire disparaître du paysage urbain.
Karl Kraus (ne pas confondre avec Karl Lagerfeld), quel que soit le temps, s’habille d’un rien.
Je replonge alors, au hasard, dans mon petit recueil Aphorismes publié par les éditions Mille et une nuits (traduction de Roger Lewinter, postface de Charles Le Blanc, mars 1998, numéro 198) et j’en attrape ceci, à la page 27, avec mon épuisette en forme de crayon à pointe de graphite :
« L’un des poèmes les plus insignifiants, et donc les plus fameux, de Henri Heine commence par la question : que veut cette larme solitaire qui trouble le regard du poète ; qui, comme il l’admet lui-même, est restée là, dans son œil, depuis des temps anciens et qui, néanmoins, est conservée, tout au long du poème, à l’état non séché. Bien qu’il se soit donc lui-même privé de la possibilité d’une vision claire, ce lyrique a exceptionnellement réussi la plastique des larmes. Je serais presque tenté de dire à son éloge qu’il a trouvé la poésie de l’orgelet. »
(Photo : Paris, rue Bichat, 10e, le 26 mars. Cliquer pour euphoriser.)
(Jacques Offenbach, Barcarolle)
brigetoun a dit:
miam un peu de Karl Kraus au réveil (Lagerfeld n’étant alors d’aucune aide, s’il en procure jamais) c’est un joli cadeau
et la barcarolle pour finir de lancer dans le jour
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigetoun : la musique n’est pas ma préférée… mais c’était le goût de l’époque !
gballand a dit:
Merci. Je ne connaissais pas Karl Kraus et vous m’avez mise en appétit. De ce pas je vais chercher le petit livre en question 😉
Dominique Hasselmann a dit:
@ gballand : vous ne lisiez pas « Le Chasse-clou » ?
Francesca a dit:
C’est vrai qu’E.T.A. Hoffmann, écrivain, peintre et musicien, aurait dû composer lui-même une musique pour ses merveilleuses histoires, mais j’ai de la tendresse pour cette barcarolle que ma grand-mère aimait fredonner.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Francesca : sans doute estimait-il que cela eût été (!) redondant…
biscarrosse2012 a dit:
Barcarolle et Orgelet pourraient être deux personnages formidables en couple, car Barcarolle, même si joue un peu le pathétique, garde, je crois, une vision positive de l’existence et cela peut faire du bien au pauvre et triste Orgelet… Tandis que Barcarolla e Orzaiolo, au contraire, auraient, ensemble, l’air beaucoup plus prosaïque et rusée.
Si Monsieur Kraus S.A. savait qu’il a finalement obtenu, par son opiniâtreté, le rachat de son talent caché ! Il faudrait aller le lui dire, ou alors lui envoyer une lettre recommandée.
Dominique Hasselmann a dit:
@ biscarrosse2012 : ce couple à la Beckett pourrait donner naissance à un petit opéra… Pour la lettre, je connais le numéro de la rue !
potaux a dit:
La poésie de l’orgelet, la poésie de compère-loriot qui entre dans la capitale de l’aube, la poésie de grain d’orge qui entre dans Capitale de la douleur, celle de grain d’aile. La poésie des compères, Char et Grindel.
Dominique Hasselmann a dit:
@ potaux : je traduis Grindel, peut-être moins connu…
Sorcière a dit:
Merci pour la traduction ! je l’ai peut-être su mais je l’avais totalement oublié !!!
@ Sorcière : l’ami Potaux aime semer des énigmes (mais pour Char il n’a pas pu…). D.H.
Sorcière a dit:
Sourire Dominique et à l’ami Potaux aussi. Semer des énigmes est toujours une danse très complice.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Sorcière : sur les temps d’une barcarolle…
Sorcière a dit:
Peut-être 😉 mais nous sommes tous ici, comme toi, sensibles à ce lien vibratoire entre le choix d’un texte, une pensée, des images et la vibration musicale que tu choisis très personnellement pour évoquer la résonnance du tout lié. Le lien est parfois surprenant 😉
@ Sorcière : même s’il est peut-être parfois… invisible ! D.H.