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"St. James Infirmary", Cahuzac, Effets secondaires, Georges Didi-Huberman, Louis Armstrong, MK2, Rooney Mara, Stalingrad, Steven Soderbergh
Le métro qui cavale en l’air vers Stalingrad fait son boucan d’enfer mais sans damnation. Les espaces de basket à l’américaine, sous sa voûte, sont soigneusement grillagés : les filets où le ballon orange s’engouffrera ne sont-ils pas aussi faits de barreaux de tissu ?
Le carrefour au loin attire toujours comme si les embouteillages de voitures étaient une reproduction en miniature de la bataille historique : mais il ne s’agit pas ici de chars d’assaut (à part certains 4 x 4 aux vitres enfumées).
J’arrive au MK2, enfin à l’abri de la pluie, la salle est très grande et nous ne sommes qu’une vingtaine de personnes (c’est l’après-midi). Comme il n’y a plus, depuis longtemps, d’ouvreuses avec lampes électriques, les spectateurs qui arrivent en retard lors d’une séance se servent de leurs smartphones dans l’obscurité : lucioles modernes, pourrait affirmer Georges Didi-Huberman.
Alors, le film Effets secondaires (titre orginal : Side Effects), est vraiment intéressant car il montre les interactions des intérêts financiers de certains psychiatres qui sont liés aux laboratoires pharmaceutiques (Cahuzac n’était pas un précurseur), ce qui les conduit à prescrire des médicaments sans se soucier de l’état véritable des patients.
Ici, Steven Soderbergh, cinéaste qui a plusieurs cordes (au sens hitchcockien du terme) à sa caméra joue sur différents registres grâce à un scénario subtil, avec un montage éclairant, et réalise une sorte de « thriller » qui serait lui-même la pilule à faire avaler au cinéphile.
Contrairement à l’avis d’un « contributeur » du Nouvel Obs’, je pense que ce film est maîtrisé de bout en bout et que la fin n’est pas aussi « morale » qu’elle pourrait sembler – il s’agit aussi d’un film sur les apparences, sur les murs invisibles entre les êtres et le poids d’un système politique les écrasant – car de cet écheveau « carcéral » (prison mentale) naît un puissant désir de liberté, comme dans d’autres œuvres du même cinéaste.
L’actrice qui tient le rôle principal, Rooney Mara, est formidable puisqu’on oublie totalement qu’il s’agit d’une actrice.
Le long du canal Saint-Martin, en rentrant, je pense à elle : elle a dû s’en sortir, finalement.
(Photos : cliquer pour agrandir.)
(Louis Armstrong, St. James Infirmary)
[ ☛ à suivre ]
brigetoun a dit:
oh le coup de pied qui se veut discret : « inégal mais plutôt habile » où le pire est peut-être la fin.
Une envie prend de marcher dans l’humide au bord du canal et de le voir ce film en vous lisant, en regardant
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigetoun : ce « critique » pratique le coup de pied de l’âne.
alainlecomte a dit:
oui, Rooney Mara est extraordinaire dans ce rôle. N’est-elle pas aussi la punk Lisbeth Salander de Millenium?
Dominique Hasselmann a dit:
@alainlecomte : Yes indeed !
Dominique Autrou a dit:
Les photos de pluie, reconnaissables entre mille avec leur ciel pur. Ce doit être grâce à la diffraction des apparences.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Dominique Autrou : la diffraction demeure belle mais ne va pas encore jusqu’à la raréfaction.
biscarrosse2012 a dit:
Finalement il faut voir ces Effets secondaires, pour pouvoir apprécier encore mieux le décalage entre cette « expérience » et le film de Paris sous la pluie entre le canal et Stalingrad. A priori ce sont deux très beaux films.
Dominique Hasselmann a dit:
@ biscarrosse : et un DVD peut être, plus tard, comme un médicament recommandé…
Désormière a dit:
Rooney Mara, à défaut des marches de Cannes, prendra-t-elle jamais celles du canauxrama ?
Dominique Hasselmann a dit:
@ Désormière : elle était venue à Paris en janvier 2012 (voir lien dans la réponse au commentaire d’alainlecomte).
Si elle prenait Caneauxrama (un cinérama en bateau), elle pourrait alors emprunter le tunnel aquatique qui court vers la Bastille !
PdB a dit:
j’adore cette chanson (comme un enterrement) (pour le film, je dis non à l’amertume…!) (le tien est bien meilleur, même par temps de pluie) (entendu dire que ce cinéaste allait cesser d’exercer cet art-là; tant mieux pour lui) (je veux dire pour le cinéma) (les « ocean » à répétition c’est tout lui)
Dominique Hasselmann a dit:
@ PdB : il a fait aussi, certes, quelques blockbusters… il faut bien vivre !
C’est quand même à l’origine un représentant du « cinéma indépendant » américain.
godart a dit:
Serait ce un effet secondaire du médicament pris ce matin, mais les trottoirs de vos photos luisent d’une telle intensité qu’ils semblent lavés au sérum physiologique.
Dominique Hasselmann a dit:
@ godart : je ne sais si vous avez vu le film, mais le sérum physiologique est justement utilisé à un moment comme placebo… (sur le trottoir, c’est donc pareil !).
Pierre Chantelois a dit:
Cinéma rime si bien avec pluie. « Chantons sous la pluie », bien sûr
Dominique Hasselmann a dit:
@ Pierre Chantelois : c’est pour vous changer de la neige !
Sorcière a dit:
Il ne faut peut-être pas que j’aille voir ce film, les seuls termes de « labo pharmaceutique » ayant sur moi un effet nocebo totalement allergisant même sans administration d’une quelconque substance placebo 🙂
Je vais le recommander à ma fille 😉 sensibilisation oblige.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Sorcière : tu es seule juge de l’indication adéquate !
PhA a dit:
(Armstrong, quand même !) (Il y avait un bout de temps que je ne l’avais pas écouté.)
Dominique Hasselmann a dit:
@ PhA : au moins ça… indépassable dans son champ clos.