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« Comme l’ont écrit des auteurs plus célèbres que moi : « Que le lecteur imagine… » et caetera. En seconde analyse, mieux vaut l’aviver un peu, cette imagination. Je savais que je resterais à tout jamais épris de Lolita ; je savais aussi qu’elle ne resterait pas à tout jamais la même Lolita. Elle aurait treize ans le 1er janvier. Dans deux ans environ, elle cesserait d’être une nymphette pour se changer en « jeune fille », puis, horreur des horreurs, en « étudiante ». Le terme « à tout jamais » qualifie seulement ma passion pour elle, pour la Lolita éternelle qui se reflétait dans mon sang. La Lolita dont les crêtes iliaques ne s’étaient point encore épanouies, la Lolita que je pouvais aujourd’hui toucher et humer et entendre et voir, Lolita à la voix stridente et aux cheveux d’un brun chaud et riche – ondes et franges sur les côtés, boucles sur la nuque – la Lolita au cou brûlant et moite, aux propos argotiques et vulgaires – « débectant », « super chic », « ballot » – telle était cette Lolita, ma Lolita, que le pauvre Catulle perdrait à tout jamais. Comment me résigner à ne pas la voir de tout l’été, durant deux longs mois d’insomnie ? Deux mois entiers sur les deux brèves années de nymphescence qui lui restaient à vivre. Que faire ? »
Vladimir Nabokov, Lolita, Gallimard 1959 (Livre de poche 1966, N° 958-959, page 101).
(scan : cliquer pour un autre aperçu.)
J’ai retrouvé ce livre hier soir, à cause d’une image furtive dans la rue, je l’ai feuilleté, et j’ai repensé aussi au film de Stanley Kubrick (1962).
A l’époque, les ligues de vertu américaines s’étaient déchaînées contre l’adaptation à l’écran, pourtant prudemment remaniée, de l’œuvre de Nabokov : l’art (littérature, cinéma, théâtre, peinture, photographie, sculpture…) attire toujours les foudres des bien-pensants.
Heureusement, ce n’est pas en France, sous le cauteleux potentat culturel de Frédéric Mitterrand, que l’on assisterait, en 2011, à de telles manifestations d’intolérance !
(Photo: Paris, 20 décembre, quai de Valmy, 10e. Cliquer pour agrandir.)
(Serge Gainsbourg, Chez les Yé-Yé)
pagenas a dit:
Interdire la censure c’est censurer… Que faire ?
Dominique Hasselmann a dit:
@ pagenas : Lénine s’est posé la question (sur un plan plus vaste).
RobespierreSaint-Just avait répondu avant lui de manière radicale (« Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ! »).Le Front national (avec son théâtre masqué) a certes le droit de s’exprimer : mais dans le cadre des lois démocratiques, portant notamment sur le racisme et l’antisémitisme.
brigetoun a dit:
non pas à de telles manifestations, Lolita n’est pas une sainte officiellement, n’attirera pas ces passions là.
Jolie adéquation de la photo finale
Dominique Hasselmann a dit:
@ brigetoun : les intégristes de tous poils (voir l’incendie de l’immeuble de Charlie Hebdo) ont pris la place des porteurs de sainteté en bandoulière (« Leur morale et la nôtre », a écrit Trotsky).
Lolita ne serait plus crucifiée maintenant mais on a connu des interdictions d’expos de photos d’enfants ou d’adolescents – penser à Larry Clarck – encore récemment.
gballand a dit:
A quand l’adaptation de « La Mauvaise vie » de Frédéric Mitterrand ?
Dominique Hasselmann a dit:
@gballand : Il l’avait fait lui-même, de manière anticipée, dans le film Lettres d’amour en Somalie (avec sa langoureuse voix off), après son livre portant le même titre (1982).
(Bizarre, la bande-annonce de cette potion cinématographique dormitive est introuvable.)
Mais une suite pourrait attirer les foules… et les intégristes !
Réalisateur sur les rangs : Christian Clavier.
PdB a dit:
elle est bien la version de « chez les yés yés » dis donc…! (pour le neveu, il doit s’entendre comme un larron avec son collègue de la guerre : dans la série menteurs, hâbleurs et hypocrites, nano1© sait vraiment se saisir du matériel politique le plus ignoble) (c’est mon mot pour le qualifier, je n’en peux mais)
Dominique Hasselmann a dit:
@ PdB : oui, j’aime particulièrement l’écho et la sonnerie au début de la chanson…
Sophie K. a dit:
Oui, les pieds-plats et les barbus n’ont que ça à faire, obliger tout le monde à penser comme eux. Rien ne les oblige à aller voir une pièce qui ne leur convient pas, mais eux veulent obliger les autres à ne pas la voir non plus. L’esprit sectaire est décidément indéracinable.
Dominique Hasselmann a dit:
@ Sophie K. : Malheur aux barbus !
Sophie K. a dit:
Chuis d’ailleurs furax moi-même, ces temps-ci… :0)
@ Sophie K. : dac’ avec toi. D.H.
Dom A. a dit:
Il doit y avoir des tendrons dévots !
Dominique Hasselmann a dit:
@ Dom A. ☛ comme pour Jarry (Alfred)…
Cowboy a dit:
Preuve que ce glissement progressif du concept de laïcité vers « le respect de tous les cultes » est une complaisance suicidaire et une insulte à l’intelligence. Une société laïque n’a pas pour vocation de respecter les cultes mais de les tolérer. Et de les tolérer dans la stricte sphère privée. Dès que le prosélyte bondieusard pointe le nez en dehors de sa cahute, le laïc se doit de lui donner de la badine sur le museau.
Et même si ça ne sert à rien (la raison étant, hélas, impuissante contre l’imaginaire et le fantasme), une société laïque doit inlassablement mettre en oeuvre une politique d’éveil des consciences contre toute forme de dogme, de foi et de discours religieux. Ses armes, à cette fin, sont l’éducation et l’art. Elles se doit de les fourbir sans cesse et d’en user sans relâche. Et qu’on vienne pas me chanter sur le mode « censurer la censure, c’est encore censurer » que « combattre les dogmes, c’est encore un dogme ». Soigner les maladies serait-il antidémocratique au nom du respect des virus ?
Dominique Hasselmann a dit:
@ Cowboy : je partage ton avis. Le virus de l’intolérance doit être combattu avec la médecine la plus appropriée (l’éducation, l’art…) ou un traitement répulsif en cas de nécessité.
Cowboy a dit:
Et je rappelle (même si ça devrait être une évidence) que la VRAIE tolérance, précisément, ne consiste pas à TOUT tolérer.
@ Cowboy : Tu connais sûrement la formule de Claudel :
« La tolérance, il y a des maisons pour ça. » D.H.
Françoise Granger a dit:
Je m’affirme tout à fait intolérante envers tous ces « bien-pensants », qui ne pensent d’ailleurs pas mais croâ-croâ et infligent leurs croyances d’un autre âge et leurs croassements aux athées, agnostiques et autres mécréants. Marre !
Ceci dit sans aucune acrimonie envers nos » chers corbeaux délicieux… »
Cowboy a dit:
@ réponse à la réponse (pourquoi le bouton répondre a-t-il disparu ?)
Me voilà donc en « communion » de pensée avec un fou de Dieu 🙂
C’est bien ma veine !!!
Dominique Hasselmann a dit:
@ Cowboy : sans doute un « miracle » dû à un certain pilier…
lignes bleues a dit:
en regardant la photo, curieusement, je n’ai pas pensé « Lolita », mais tendron de veau… et au couple de Gaulle/Malraux qui, somme toute, nous change de Sarkozy/Mitterand (vous vous souvenez, de Gaulle, « les Français sont des veaux »)
mais où vont se nicher les associations d’idées ?
Dominique Hasselmann a dit:
@ Françoise Granger (16:06) : respectons aussi le corbeau, ce « voyageur parti des rivages de la nuit », qui rend visite à Edgar Poe.
Dominique Hasselmann a dit:
@ lignes bleues : précisez « Frédéric » avant Mitterrand, dans le deuxième couple !
De Gaulle n’était pas toujours très… tendre avec les Français, mais il s’exprimait en langage châtié (il connaissait même le volapük).
quotes on lost love a dit:
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