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En mars 2008, Adrien Le Bihan fit paraître sans crainte un livre implacable, sous le titre La Fourberie de Clisthène, procès du biographe élyséen de Georges Mandel (éditions Cherche-bruit), qui démontait et dénonçait l’imposture d’un ouvrage publié par Nicolas Sarkozy sur l’ancien ministre fusillé par les nazis en juillet 1944.

Cette « biographie », qui remonte à 1994, et qui accumulait plagiats et erreurs, semblait principalement destinée à dessiner un portrait en creux de son auteur, devenu depuis président de la République et, le 15 février, candidat officiel à sa propre succession.

Or, au cours de sa dernière intervention télévisée en tant que chef de l’Etat, retransmise le 29 janvier en direct sur seulement neuf chaînes de télévision, Lauren Malka, de MyBoox.fr, remarqua que sur la table de l’un des quatre interviewers (Claire Chazal et Laurent Delahousse, Jean-Marc Sylvestre et François Lenglet) s’étalait un livre à couverture bordeaux qui était, en réalité, non pas un magazine politique pour « faire bien dans le décor » mais cette même biographie signée, sinon écrite intégralement, par Nicolas Sarkozy.

(Capture d’écran du Parisien.fr. La flèche a été rajoutée.)

Quel était le rôle assigné à cet objet planant non identifié, sur lequel aucun gros plan ne fut effectué par le réalisateur de l’émission ?  Rappeler à quelques connaisseurs que Sarkozy écrit aussi bien qu’il parle (« J’suis candidat ! » a-t-il claironné dimanche soir, entre autres formules ciselées) ? Faire diversion ? Meubler le bureau d’un des présentateurs de l’émission œcuménique ? Aider à poser une question sur l’Histoire et le révisionnisme qui se porte allègrement ces temps-ci ?

Contacté en tant que spécialiste du sujet, Adrien Le Bihan a donné toutes les explications et les hypothèses utiles dans l’interview publiée le 2 février par MyBoox.fr et qu’il m’avait transmise le jour même. On en retiendra notamment ce passage :

« Sarkozy aura beau, selon ses humeurs, se prétendre gaulliste, la manière dont il s’est comporté avec de Gaulle dans sa biographie (se référant avec moins d’exactitude à lui qu’à Raoul Salan, futur chef de l’OAS) est digne par endroits des gens du Front national. Qui sait si elle ne trahit pas des affinités avec les Le Pen ? » 

Or ce genre de manipulation n’est pas sans faire penser à l’affiche de campagne du candidat de la droite aux prochaines élections présidentielles, révélée jeudi.

(Capture d’écran du Figaro.fr. Le tag a été rajouté.)

Comme l’a rapporté Le Nouvel Observateur, la photo du paysage maritime devant lequel pose « le capitaine » Nicolas Sarkozy a été prise en Grèce et achetée à une agence pour donner une sorte d’espace en cinémascope à la vedette du moment.

Un internaute a, hélas, débusqué la supercherie, amusante de la part de quelqu’un qui n’a qu’un seul refrain à la bouche quand il va sur le terrain : « Fabriquons, produisons français ! ». Comme si, à Marseille, par exemple, où le globe-trotter étiqueté UMP dans le dos de sa (future) veste sera présent dimanche pour un meeting, on ne pouvait pas prendre un cliché de la mer toujours recommencée (à l’image d’un quinquennat qui n’en finit pas)… ?

Dans l’art du mensonge et de la manipulation, l’artiste sarkozyste chauffe sous les spots. Mais son affiche d’aide à la vente, avec slogan minable et photo plate comme une limande, est déjà abondamment détournée.

Finalement, Nicolas Sarkozy encourage délibérément la créativité, et Mitterrand (Frédéric) devrait en être tout frétillant, juste pour quelques semaines encore.

(Charles Trenet, La Mer)